ANI - Le ministre de l'Information, Ziad Makary, a appelé la communauté internationale et la Francophonie à intervenir immédiatement pour mettre fin à la spirale de violence à laquelle le Liban est confronté. Il a également exhorté à ne pas permettre de ridiculiser les valeurs sur lesquelles reposent la démocratie et les relations internationales.

Les propos du ministre de l’Information ont été tenus lors d'un discours prononcé le troisième jour du 19e Sommet de la Francophonie qui se déroule à Paris, et auquel il a participé à la tête d'une délégation comprenant l'ambassadeur du Liban à l'UNESCO, Mustafa Adib, et le chargé d'affaires de l'ambassade libanaise à Paris, Ziad Taan, ainsi que Nadeem Sourati de la mission permanente du Liban auprès de l'UNESCO, le conseiller à l'ambassade du Liban en France, Joseph Jabbour, et le Dr. Georgina Hardan.

En marge du sommet, le ministre de l'Information a rencontré le président français Emmanuel Macron, ainsi que les Premiers ministres du Canada, Justin Trudeau, et du Maroc, Aziz Akhannouch, puis la ministre des Affaires étrangères du Canada, Mélanie Joly.

Ci-dessous le discours prononcé par le ministre Makary :

Monsieur le Président Macron,

Mesdames et Messieurs les chefs d'Etat et de gouvernement,

Madame la Secrétaire Générale

Excellences,

Mesdames, Messieurs,

 Permettez-moi tout d’abord de vous transmettre les salutations de M. le Premier Ministre Najib Mikati qui est contraint de rester au Liban au vu des circonstances tragiques que mon pays traverse.

     Monsieur le Président, je tiens, avant tout, à vous remercier pour votre soutien jamais démenti envers le Liban. La France s’est toujours tenue aux côtés de mon pays dans ses heures les plus sombres.

J’en veux pour preuve les nombreuses initiatives de la France en solidarité avec le Liban. La dernière initiative franco-américaine destinée à arrêter l’agression à laquelle nous faisons face a été soutenue par de nombreux pays amis.

Madame la Secrétaire Générale de la francophonie, je saisis cette occasion pour vous remercier de la solidarité que vous avez exprimée avec le peuple libanais dans cette nouvelle épreuve qu’il traverse.

Excellences, Mesdames, Messieurs,

Pour nous, Libanais, ce sommet aujourd’hui prend un tour tout particulier. Il intervient alors que le pays traverse une des périodes les plus sombres et les plus difficiles de son histoire.

A l’heure même où je vous parle, un million deux cent mille personnes sont déplacées, contraintes de laisser derrière elle leur maison, leurs biens, leur gagne-pain, et les souvenirs d’une vie. Ces déplacements internes viennent aggraver une situation économique désastreuse et la dégradation de nos infrastructures déjà fragiles.

A l’heure même où je vous parle, le sang coule. Plus de 2000 personnes ont déjà perdu la vie. Plus de 10 000 autres sont blessées. Ce ne sont pas des chiffres que l’on cite mais des vies humaines. Des hommes, des femmes, des enfants qui avaient des projets, des rêves, un avenir.

A l’heure même où je vous parle, les hôpitaux au Liban ne peuvent plus faire face à l’afflux de patients.

A l’heure même où je vous parle, alors que les écoliers du monde entier ont effectué leur rentrée des classes, les enfants au Liban, tristes et apeurés, « se réveillent » quotidiennement au son assourdissant des bombes ou celui des bangs supersoniques de l’aviation israélienne.

A ces éléments s’ajoute la présence, depuis plus de 13 ans, d’environ 2 millions de déplacés syriens venus pour des motifs principalement économiques. Un chiffre effrayant puisqu’il correspond à 40 % de la population libanaise, ce qui représente une menace existentielle pour mon pays.

Nous ne pouvons pas permettre que les valeurs qui fondent l’espace démocratique et les relations internationales soient bafouées dans l’indifférence générale. Chaque vie humaine compte. Chaque mort est une tragédie. Les attaques indiscriminées de grande ampleur des bippers et des talkie-walkie- comme celles qui ont frappé le Liban et qui ont causé plusieurs milliers de victimes constituent de facto un crime de guerre qui ne doit pas rester impuni. Si elles restent impunies, comment pourrait-on alors garantir qu’elles ne soient pas répliquées ailleurs ?

Les frappes incessantes de l’aviation israélienne et ses attaques terrestres doivent être arrêtées. Le mépris patent du droit international et du droit international humanitaire dont fait preuve Israël ne peut et ne doit plus être accepté. 
 

57 000. C’est le nombre de fois où Israël a violé la résolution 1701 en pénétrant les espaces aérien, maritime et terrestre du Liban, et cela avant même les frappes de ces dernières semaines…

Nous lançons donc un appel à ce que des actions décisives soit menées pour aboutir à la condamnation des violations incessantes de notre souveraineté territoriale de la part d’Israël et à l’application pleine et entière de la Résolution 1701 du Conseil de Sécurité dans les frontières internationalement reconnues du Liban. Ce texte, en effet, représente l’engagement de la communauté internationale à préserver la stabilité, la souveraineté et la sécurité du Liban et de son peuple et, au-delà, celles de toute la région. C’est le meilleur outil dont nous disposons pour garantir que la diplomatie, aussi difficile soit-elle, l’emporte.
 

L’heure aujourd’hui est à l’action mais le Liban ne peut agir seul. Il a besoin de la grande famille de la francophonie. Une francophonie qui doit plaider, à nos côtés, pour le respect du droit international, du droit international humanitaire et des résolutions des Nations-Unies.  

Si nous n’agissons pas de toute urgence, de manière solidaire et concertée, nous courons le risque de continuer une course folle qui mènera, au-delà de notre pays, toute la région à sa perte.

Nous demandons donc votre soutien pour exiger un cessez-le feu immédiat au Liban. Le pays, quant à lui, est décidé à agir et à prendre sa part dans la mise en œuvre de la résolution 1701. Et aujourd’hui, malgré la très grave crise économique que traverse le Liban, le gouvernement s’est engagé à recruter 1 500 nouveaux soldats pour être déployés dans le sud, dans le cadre de notre engagement national envers cette résolution.

En contrepartie, il est nécessaire qu’Israël se conforme aussi à ses engagements, en cessant son occupation du territoire libanais, ses attaques incessantes et ses violations constantes de notre souveraineté.

Le Liban refuse la guerre. Comme le disait Jean-Paul II « Le Liban est plus qu'un pays, c'est un message », un message de tolérance, de vivre-ensemble et de paix.

Et si nous n’endiguons pas cette spirale de violence, l’embrasement régional qui s’en suivra se répandra avec la vitesse et la violence d’un feu hors de contrôle avec toutes les conséquences que cela implique pour le reste du monde.

Je vous remercie. (Fin du discours).

  ==============D.CH.