ANI - L'ambassadeur de France au Liban, Hervé Magro, et son épouse ont donné une réception à l'occasion de la Fête nationale française à la Résidence des Pins, en présence de Mahmoud Berri, représentant le président du Parlement, Nabih Berri, du ministre de l'Intérieur et des Municipalités, Bassam Mawlawi, représentant le Premier ministre Najib Mikati, de Mgr Boulos Matar, représentant le patriarche maronite Béchara Boutros Rai, de l'ambassadeur Hani Chmaytelli, représentant le ministre des Affaires étrangères Abdullah Bou Habib, du vice-président du Parlement, Elias Abou Saab, du vice-Premier ministre Saadé Chami, du ministre des Télécommunications Johnny Qorm et du ministre des Finances Yousef Khalil, ainsi que d’un grand nombre de députés et de personnalités de divers domaines.
A cette occasion, l’ambassadeur Magro a prononcé l’allocution suivante :
Chers représentants du parlement et membres du gouvernement,
Cher M. le Sénateur représentant les Français établis hors de France, M. Cadic,
Chère Mme la députée des français établis hors de France, Mme Lakrafi,
Mesdames, Messieurs, chers tous.
Je tiens à remercier tout d’abord les élèves et sœur Nawal de l’école des Saints-Cœurs d’Ain Najm pour l’interprétation des hymnes nationaux libanais et français.
J’ai souhaité cette année que ce soient des jeunes qui chantent nos hymnes nationaux comme un symbole de l’importance que constitue l’éducation pour l’action de la France au Liban avec plus du tiers de notre appui global (35 M€) tant pour les établissements publics que privés, allant du primaire via les filières générales ou techniques et professionnelles vers l’universitaire. L’école est le creuset où se construit le citoyen de demain par le truchement des liens sociaux, du savoir être et du vivre-ensemble au-delà de l’acquisition des compétences.
Je voudrais ainsi adresser un message d’espoir à cette jeunesse : « Votre avenir est entre vos mains comme celui du Liban. Je réaffirme ici notre détermination à contribuer à mettre à votre disposition les meilleurs outils pour faire que votre pays retrouve sa prospérité et sa stabilité. »
Nous nous mobilisons aussi, outre l’éducation, pour améliorer l’accès aux services de base dans la santé ou encore l’eau, notamment au profit des plus vulnérables. Au total, c’est plus de 100 millions d’euros qui ont été mobilisés au profit de projets sur l’ensemble du territoire, sans compter les nombreuses coopérations décentralisées, le mécénat d’entreprises, les dons de fondations et de citoyens français. Lors de mes visites de terrain, j’ai visité des centres de santé, des hôpitaux, des stations de pompage, des écoles et à chaque fois j’ai été impressionné par l’engagement de nos partenaires et la qualité des projets. Ceux-ci s’adossent aux priorités nationales libanaises dans le cadre d’un échange continu et constructif avec les autorités.
J’ai aussi pu mesurer au travers de mes échanges avec nombre d’entre vous à quel point la Francophonie était un autre enjeu partagé. Alors que se tiendra début octobre le Sommet de Villers-Cotterêts, je suis convaincu de l’importance de préserver celle-ci au Liban, « Pays message », car le plurilinguisme est au cœur de l’identité libanaise. Les Libanaises et les Libanais constituent les ponts entre les différentes cultures et les géographies mais ne nous y trompons pas, en perdant leur spécificité, ils perdront aussi leur avantage comparé. Nous sommes aussi déterminés à préserver la culture en ces temps troublés, grâce au réseau exceptionnel des antennes de l’Institut français du Liban, autour de l’offre d’espaces de création, de cinéma, de littérature, ou encore de débat d’idées.
Mesdames et Messieurs
Je mesure bien également les défis économiques qui restent à relever alors que de nombreux Libanais ont été plongés dans la précarité ou la pauvreté. Nous voyons, dans certains quartiers un parc automobile luxueux, des terrasses de restaurant bondées, des boutiques de luxe. Ce constat superficiel pourrait nous faire penser que l’économie va mieux mais il n’en est rien contrairement à un sentiment curieusement répandu.
Il n’en est rien puisque l’économie libanaise ne fait que subsister en grande partie grâce aux transferts de la diaspora, qui soutiennent la consommation et grâce à la nouvelle politique plus prudente de la Banque du Liban.
Il n’en est rien car le secteur bancaire est toujours à l’arrêt, les exportations continuent de diminuer, les infrastructures ne peuvent pas être entretenues et, surtout, la moitié de la population vit sous le seuil de pauvreté. Chacun connaît pourtant le chemin des réformes à emprunter pour remettre l’économie libanaise sur les bons rails.
La France s’efforce, sans attendre ces réformes nécessaires, d’apporter son appui sur certains segments spécifiques où des progrès rapides peuvent être obtenus. Nous avons remis un ensemble d’études et documents d’appels d’offres pour accélérer la réhabilitation complète du port de Beyrouth mais également sa mise aux normes en matière de sécurité. Nous étudions également la possibilité d’offrir des solutions de financement aux PME libanaises formelles qui souhaitent croître à l’export.
Je demeure optimiste, oui, en effet ! Les réformes nécessaires que je n’énumérerai pas ce soir peuvent rapidement changer la donne en s’appuyant sur un vivier de talents incroyables et les entreprises françaises que je salue ici pour leur résilience et leur engagement.
Celles-ci sont en effet restées tant en temps de paix comme en temps de crise comme des actrices importantes des nouvelles dynamiques à l’œuvre dans le pays autour notamment des nouvelles technologies : un tiers des emplois créés au Liban, dédiés à des missions qui s’exercent à l’international, bien au-delà du Proche Orient. Il suffit d’observer les initiatives de la nouvelle économie tech et l’éclosion des start-ups au Liban, au Beyrouth Digital District, à l’école 42 ouverte par CMA CGM. Vous y verrez des étudiants, aux aptitudes exceptionnelles, au-delà de la moyenne internationale. C’est aussi là l’un de mes priorités pour préparer le Liban de demain. Je ne vais pas ici énumérer tout le potentiel qui existe dans ce pays de l’industrie à l’agriculture et qui mériterait que les stratégies adéquates soient mises en œuvre. Nous sommes déterminés à les accompagner.
Mesdames et Messieurs,
Près de quatre ans après la tragédie du port de Beyrouth, on ne peut malheureusement que constater la paralysie des enquêtes et du déroulé judiciaire alors que demeurent un fort désir de justice et de lutte contre l’impunité pour entendre la souffrance des victimes, refuser l’amnésie et rechercher la vérité. Le redressement du Liban passera immanquablement par un système judiciaire rénové sous la vigilance continue de la société civile et les principes de la gouvernance démocratique. C’est le sens de l’engagement français à la réforme de la justice dans ce pays, que nous ne devons pas perdre de vue. Il va de pair avec une coopération bilatérale de qualité avec les forces de sécurité intérieure que je souhaite saluer ici.
Dans ce contexte, je tenais à rappeler les efforts constants de la France afin d’aider à la sortie de crise politique actuelle. Vous savez les liens historiques, humains, culturels qui nous attachent à vous. C’est leur force qui explique notre engagement à aider votre pays à trouver les solutions pour construire un avenir plus stable et prospère, en commençant par l’élection d’un Président de la République.
C’est la raison de notre implication, aux côtés de nos partenaires du Quintet, pour faire tout ce qui est entre notre capacité afin que ce vide ne se prolonge pas. Nous le disons, avec Jean-Yves le Drian, depuis plusieurs mois : il est urgent qu’un Président soit élu, qui puisse lancer, aux côtés d’un gouvernement de plein exercice, les actions nécessaires au redressement du pays tant sur la scène intérieure que régionale. Nous avons bien conscience qu’il y a des inquiétudes, des peurs, des traumatismes, qui ne doivent pas être ignorés, mais il y aussi des calculs dangereux, qui ne peuvent pas être tolérés. J’ai confiance dans la capacité des Libanais à surmonter les défis et à éviter les pièges. Je le dis en tant que représentant de la France, amie du Liban, et je le dis avec humilité, car in fine c’est aux Libanais de prendre leurs responsabilités et de démontrer leur volonté d’aller de l’avant ! Vous pouvez compter sur la France.
Cet engagement français c’est également l’effort diplomatique en cours afin d’éviter le pire dans le conflit qui frappe le sud du pays. La commémoration de ce 14 juillet est en effet malheureusement assombrie par la guerre qui le déchire depuis le 8 octobre et par la menace persistante d’une escalade meurtrière qui toucherait l’ensemble du Liban. La France ne ménage aucun effort pour favoriser une désescalade et un règlement juste, qui garantisse la stabilité et la souveraineté du Liban. Aux côtés d’autres partenaires, nous sommes porteurs de propositions qui ont permis d’identifier les grands paramètres d’un accord possible : la mise en œuvre complète de la résolution 1701, le renforcement de la FINUL et de la présence des Forces armées libanaises au Sud-Liban, la démarcation de la frontière terrestre entre Israël et le Liban. Ces dernières semaines nous avons multiplié les démarches diplomatiques auprès de l’ensemble des acteurs impliqués, notamment dans la région, car nous parlons à tous, sans exclusive.
Nos efforts ne se limitent évidemment pas au Liban, dont nous savons bien, hélas, qu’il ne peut complètement s’abstraire des conflits de son environnement régional tourmenté. Et c’est pourquoi, face à la tragédie de Gaza, nous poursuivons notre mobilisation, d’abord pour un cessez-le-feu durable, ensuite pour que se réengagent des négociations menant à l’établissement d’un État palestinien qui puisse vivre en paix et en sécurité à côté d’Israël.
L’engagement français, c’est également 700 militaires français, sous casque bleu depuis 1978 dans le sud du pays et je souhaite saluer les Spahis venus représenter la Force Commander Reserve. Les militaires français mènent avec détermination leurs missions sous l’égide de la FINUL, dans des postes clefs à Naqoura, comme celui de chef d’état-major et représentant national. Je veux rendre hommage à leur engagement constant, malgré les risques et les difficultés, au service de la paix.
Ils sont le témoignage le plus éclatant d’une coopération militaire bilatérale dense que nous avons fait le choix de poursuivre et renforcer au gré des crises successives, dans tous les domaines : lutte contre le terrorisme et le narcotrafic, formation des cadres, action de l’État en mer, Montagne, Génie, Santé – au travers de formations au Liban et en France, de missions d’expertise et de dons de matériel. Avant-hier, 12 juillet, 20 véhicules blindés de transport de troupes VAB et 20.000 rations de combat ont ainsi été livrés aux Forces armées libanaises. Nous agissons enfin au sein de l’Union Européenne, pour mobiliser une aide significative au profit des FAL.
Enfin, je souhaitais tout particulièrement remercier les mécènes ayant généreusement contribué à la réussite de la célébration de cette fête nationale qui, je le rappelle, est dédiée à la tenue des Jeux Olympiques et Paralympiques qui se dérouleront en France à compter du 26 juillet 2024. J’en profite pour remercier ceux qui permettront à 16 pompiers de Beyrouth d’assister à plusieurs compétitions sportives durant ces jeux. Nous n’oublions pas le lourd tribut qu’ils ont payé lors de l’explosion du 4 août.
La France est fière d’accueillir ces 23ème Olympiades et plus particulièrement de mettre en valeur le sport comme vecteur de cohésion et du goût de l’effort. 22 jeunes volontaires libanais sont déjà partis en France pour participer à l’encadrement des JO.
Je demande maintenant aux responsables des comités olympique et paralympique ainsi qu’aux athlètes libanais sélectionnés, qui s’envoleront très bientôt pour Paris, de bien vouloir me rejoindre sur le perron. Avec une pointe d’envie, je leur souhaite, en votre nom à toutes et à tous, le meilleur pour cette formidable aventure.
Vive la France, vive le Liban, vive l’amitié franco-libanaise !
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