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Les Russes ignorent tout du Liban Maria Ivanova, chef du projet touristique «MyLebanon» va changer la donne

Propos recueillis par Sana Nehmé

Traduction: Nayla Assaf
Rédaction: Diala Hanna

ANI - Le peuple russe ne connaît pas grand-chose sur le Liban, révèlent les dernières statistiques. Maria Ivanova, chef du projet touristique " MyLebanon " (Mon Liban), va toutefois changer la donne.

"C'est le Liban qui m'a choisie, et pas l'inverse", affirme Mme Ivanova en parlant de son projet. "L'idée est venue spontanément. Cependant, je crois maintenant, et contre toute attente, que j'étais prédestinée à connaître ce petit pays arabe".

Elle raconte avoir ouvert son premier studio de cinéma à l'âge de 21 ans, obtenant ainsi le statut de "plus jeune productrice de Russie".

Quant à son histoire avec le Liban, elle a débuté avec le long métrage "City of Strangers", projet a présent gelé mais sur lequel elle a travaillé après le succès, en 2014, du court métrage " The Last " ou " Sonuncu ". Ce film, produit par sa compagnie Buta Film, avait réussi à faire partie de la sélection officielle au 67e Festival de Cannes.

Quant à l'histoire de "City of Stangers", elle est celle d'une femme musulmane qui se rend dans un pays européen étranger où elle se retrouve seule.

"Elle a peur, elle est confuse et détruite. Elle est enfermée entre quatre murs, où l'action se déroule. Ce drame psychologique montre l'indifférence de l'humanité qui n'est pas consciente de tout ce qui se passe autour d'elle", explique Mme Ivanova. "Je pense que nous continuerons le tournage dans l'avenir. Le script est tellement beau qu'il est impossible de l'oublier. J'ai d'ailleurs acheté tous les droits du film", poursuit-elle.

L'intérêt que Maria Ivanova porte aux pays arabes aurait-il donc vu le jour à partir de l'histoire d'une femme musulmane? «Bien sûr! » assure-t-elle, révélant qu’après la suspension du projet, bien qu’étant investie dans plusieurs projets,  l'histoire d'une femme musulmane, bien que fictive, lui trottait toujours dans la tête. Elle a alors pris la décision de travailler sur un documentaire. L’acteur principal, Mohammad, est un garçon syrien dont les parents ont envoyé seul de Damas à Berlin.
Ce documentaire devait être filmé en Syrie et c’est ainsi que Maria Ivanova, en route pour Damas, s’est retrouvée pour la première fois à Beyrouth.
«Damas était ravagée par la guerre. J'entendais le bruit des explosions la nuit. Les gens étaient gelés par le froid et la peur. Nous avons dû surmonter d'innombrables obstacles pour pouvoir enregistrer l'interview tant voulue avec les parents de notre personnage principal. Et cela valait la peine. J'ai trouvé la raison pour laquelle les parents avaient envoyé Mohammad seul dans cette Europe, à l'autre bout du monde. C'est seulement après avoir regagné Beyrouth que nous nous sommes sentis de nouveau en sécurité », se rappelle-t-elle.
«L'ambassade de Russie au Liban et le Centre culturel nous ont énormément aidés. Ils nous ont désigné un interprète, nous ont donné une voiture et des guides. Nous sommes allés dans les montagnes, chez les réfugiés syriens qui vivent dans des camps, à l'intérieur de tentes (…). Leur espoir leur a permis de survivre dans ces conditions, à tous les niveaux (…). A la fin du tournage, il nous restait plusieurs jours avant de partir pour Moscou. L'ambassade de Russie m'a invitée à  une fête de Noël où j'ai fait la connaissance de Libanais qui aiment la Russie et qui ont fait leurs études dans l'Union soviétique. C'est une élite d'hommes d'affaires et de responsables politiques. Ils ont proposé de travailler sur un projet culturel conjoint libano-russe. J'ai alors eu l'idée d'organiser le premier festival du Cinéma russe au Liban, qui coïncidait avec l'Année du Cinéma en Russie».
La concrétisation de cette idée  a nécessité  9 mois de réunions interminables, de négociations et d’allers retours entre Moscou et Beyrouth. « Je suis très reconnaissante pour le support du Rossotrudnichestvo et du ministère russe des Affaires étrangères. Ce festival est même devenu le premier projet de ce type. Les autorités libanaises nous ont accordé une grande aide, y compris toute l'information dont nous avions besoin. Amal Abou Zeid, député libanais, est devenu le sponsor principal de notre festival. Les bandes annonces pleuvaient de toutes parts. L'événement a remporté un succès fou. Plus de 5000 spectateurs y ont pris part. Dans le cadre du festival, j'ai présenté mon premier film documentaire " Fleeing the War " sur les réfugiés syriens », raconte-t-elle.

Bien entendu, le public n’a pas été indifférent face à l'histoire des gens dont le sort a été brisé par la guerre mais qui continuent de rêver en essayant de survivre.
« Plus tard, à Moscou, avec la représentation du Haut-commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés en Russie, nous avons lancé la sortie de " Fleeing the War ". En quelques mois, la Croix-Rouge suisse a organisé une projection de notre film en Suisse. J'ai trouvé des informations très utiles durant le Festival du Cinéma russe. Nous avons découvert que les Libanais aiment le cinéma russe. Plusieurs spectateurs n'ont pas quitté après la projection et ont posé des questions. Parfois, il n'y avait pas assez de sièges et les spectateurs étaient assis sur les marches et par terre », poursuit-elle.
Selon Mme Ivanova, les Libanais aiment les Russes, probablement pour des raisons historiques. «L'amour de la Russie a été transmis de génération en génération. Les hommes libanais aiment d'ailleurs nos femmes parce que dans ce petit pays du Moyen-Orient, il y a beaucoup de familles internationales et les enfants parlent les deux langues, l'arabe et le russe.
Autre fait intéressant, les Libanais sont très curieux. Ils ne sont pas indifférents à ce qui se passe dans le monde. Ils sont effectivement curieux et très actifs. Les Libanais sont éduqués, ils parlent trois langues, (l'arabe, le français et l'anglais). Après le festival, j'ai beaucoup voyagé dans les pays de l'Est, j'ai visité le Qatar, le Bahreïn, les Emirats arabes unis et la Jordanie.
Cependant j'ai réalisé que mon cœur appartenait au Liban. J'avais hâte de montrer ce pays incroyable aux Russes. Je voulais que mes compatriotes rencontrent le vrai Liban. C'est un pays sûr, étonnamment pittoresque et passionnant. Un nouveau projet est né. Je l'ai appelé " MyLebanon " (Mon Liban) », souligne-t-elle.
Concernant les problèmes rencontrés lors de la mise en œuvre du projet, ils ont surtout été d’ordre organisationnel. «  J'ai mis l'équipe en place. Nous avons lancé le site électronique et nous l'avons rempli d'informations pendant plusieurs mois. Nous avons maintenant plus de 200 fichiers et publications spécial Liban et des nouvelles au quotidien. Nous avons développé plus de 30 itinéraires touristiques polyvalents, notamment des activités de yoga, des cours de langue arabe, des reportages sur les meilleures discothèques de Beyrouth, sur  de magnifiques temples romains, la saison de ski, etc… Nous essayons de satisfaire tous les goûts. Nous offrons également des visites d'entreprises, des conférences, des formations d'équipes et plusieurs autres activités », explique Mme Ivanova.
Et de poursuivre: « Nous avons récemment signé un mémorandum d'entente avec les 50 meilleurs hôtels au Liban. Nous les avons sélectionnés sur place, les photos sur les sites manquant de précision à ce niveau. Etant destinés à différentes catégories de touristes, nos hôtels partenaires vont du bon marché au 5 étoiles de luxe.
Nous  avons déjà un bureau au Liban et nous avons signé des contrats avec les meilleurs guides touristiques et les compagnies de transport les plus performantes. Notre objectif est de satisfaire nos clients ».
Le projet « MyLebanon » est d’autant plus important qu’il est la seule source d'information sur le Liban en Russie. Les voyageurs russes disposant d’un large éventail de destinations touristiques, « MyLebanon » ne se consacre qu’au Liban.
«Les autres agences de voyage ont une centaine d'autres destinations. Théoriquement, il leur est impossible d'assurer à leurs clients toutes les précisions qu'ils cherchent à avoir. Nous avons également parcouru le Liban en long et en large. Cela nous permet d'offrir à notre clientèle des itinéraires fiables.
Nous avons récemment développé avec l'agence Ulysse Travel Club une idée commune, " Art de Beyrouth " sur  des expositions fabuleuses, des galeries d'art contemporain et des vols en hélicoptère.
Par ailleurs, nos guides sont capables d'organiser des excursions même dans les maisons des collectionneurs d'art privé, et si vous le voulez, ils vous emmèneront même aux clubs secrets de Beyrouth dont l'entrée est, par exemple, " dissimulée " par un ordinaire salon de coiffure pour hommes », précise-t-elle.
Pour Maria Ivanova, le Liban est une combinaison étonnante et très harmonieuse de l'Est et de l'Ouest. C’est un pays attrayant pour les touristes actifs, parce que découvrir un nouveau monde est une idée bien séduisante. Mais qu'en est-il du stéréotype des touristes russes selon lequel le Liban n'est toujours pas en sécurité?
« J'ai été au Liban plus de 20 fois en deux ans et demi. Honnêtement, je m'inquiète davantage pour ma sécurité en voyageant en Allemagne ou en France », répond Mme Ivanova. « En plus, si la situation était vraiment dangereuse au Liban, nos touristes auraient été les premiers informés. Nos autorités réagissent promptement à toute menace sécuritaire. Pensez-y. La Turquie n'est pas recommandée et l'Egypte est presque fermée. Les décisions sont prises en Russie à la vitesse de l'éclair ».

Sur un autre plan, le ministère libanais du Tourisme est assez intéressé par l'essor du projet " MyLebanon ". « Mais nous espérons avoir un support plus sérieux », révèle-t-elle. «Récemment, nous avons organisé un tour pour des correspondants de " L'Officiel Voyage ". Le ministère libanais du Tourisme a pris en charge une partie des dépenses. Mais cela demeure insuffisant. Nous travaillons actuellement, alimentés par notre enthousiasme et notre amour pour le Liban. Toutefois, l'évolution de notre projet nécessite des ressources supplémentaires. Nous croyons qu'elles seront assurées par les autorités libanaises. Ainsi, nos opportunités augmenteront. Nous nous concentrons actuellement sur Moscou et Saint-Pétersbourg mais la Russie est un pays géant et les touristes des autres villes sont aussi de potentiels clients ».
Le succès de « MyLebanon » aidant, Maria Ivanova a  l'intention d'inverser la trajectoire, et pas seulement en organisant des tours pour les Libanais à Moscou et Saint-Pétersbourg, mais en leur faisant découvrir Dagestan, Kamchatka, Altai et Sochi.
«Un grand nombre de Libanais rêvent de visiter la Russie. Nous avons dernièrement fait la connaissance au Liban de l'artiste Nizar Dagher, enseignant d'université. Ses étudiants veulent visiter la galerie Tretyakov et l'Hermitage. Les demandes ont déjà été acceptées. J'ai contacté le projet de l'avancement de la Russie au Liban " MyRussia " (Ma Russie) », souligne-t-elle.

Par ailleurs, et parmi les autres avantages du projet MyLebanon, citons l’aide qu’il apporte aux hommes d'affaires au Liban.
« J'ai un partenaire au Liban et nous travaillons ensemble pour renforcer les relations entre nos deux pays. Il s'occupe des hommes d'affaires qui ont besoin d'un investisseur russe. Les hommes d'affaires russes s'adressent à moi pour leur trouver un partenaire au Liban. Nous suivons les accords, les réunions et les négociations jusqu'à la fin et nous leur assurons une aide légale.
Nous comprenons parfaitement bien les secteurs libanais qui intéressent les investisseurs russes. Certains d'entre eux ont déjà investi dans l'économie libanaise. Je suis sûre que la coopération avec le Liban portera ses fruits. Nous avons seulement six projets dans notre portefeuille mais ils sont tous prometteurs», conclut Mme Ivanova.
Une approche réfléchie, une bonne stratégie et surtout l'amour de la Russie et du Liban contribueront à la réussite des projets " MyLebanon " et " MyRussia " afin de promouvoir les relations entre les deux pays.

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